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CVS Alzheimer, faire du CVS un lieu de vie

28/02/2014 21:49

 

FAIRE DU C.V.S. UN LIEU DE VIE

 

Une formation pour un Conseil de la Vie Sociale

Adapté aux publics, aux proches et aux professionnels

concernés par la maladie d’Alzheimer et maladies apparentées

Conçue par la Fnapaef en partenariat avec la Fondation Médéric Alzheimer

 

NOTE SUITE A LA REALISATION

DE LA PREMIERE SESSION EXPERIMENTALE A K.H. en BRETAGNE

LE 13 JANVIER ET LE 18 FEVRIER 2014

 

L’origine de cette formation CVS/Alzheimer

 

Pour les lecteurs qui prendraient connaissance de cette nouvelle action de formation à travers cette note, nous vous proposons tout d’abord de situer cette seconde journée de formation expérimentale CVS/Alzheimer dans l’ensemble du parcours qui nous a conduits jusqu’ici. Il sera possible d’avoir une vue d’ensemble en consultant notre support d’animation au moment de l’animation des sessions.

 

La formation que nous avons mise au point et expérimentée n’est pas simplement une formation généraliste sur le CVS telle que celle que la FNAPAEF distribue déjà. Nous nous adressons à des aînés qui, comme l’écrit Cécile Delamarre, « ont bien souvent peur de ce qu’ils peuvent vivre dans leur environnement, y compris dans les relations qu’ils ont avec les professionnels qui les entourent. » Cette formation CVS/Alzheimer tente donc évidemment d’intégrer les spécificités de son environnement.

 

 

Les principes fondateurs

 

Elle repose sur un certain nombre de principes fondateurs issus de nos débats à K.H., en Bretagne, en mai 2013. Ces principes, que nous rappelons ici, seront les piliers des contenus de formation que nous avons développés.

 

·         Le dispositif CVS en milieu Alzheimer et apparenté, n’est pas mis en place pour éviter les personnes touchées par la maladie, mais bien au contraire pour les intégrer à la vie de leur milieu.

·         Toutes les personnes touchées par la maladie sont bien présentes, même si leurs moyens de communication se réduisent à leur simple regard.

·         C’est aux personnes qui composent l’environnement, professionnel et familial, qu’il revient d’apprendre un nouveau regard ainsi qu’un nouveau mode de communication. Nous misons sur une gestion des relations par la « parole », même si elle est non-verbale, plus que par l’enfermement dans la maladie.

 

 

Les objectifs de la formation CVS/Alzheimer

 

 

·         Contribuer à ce que les établissements soient des  lieux de vie et de concertation grâce au CVS.

·         Faire remonter l’information des collectifs, résidents, proches et professionnels.

·         Garantir l’exhaustivité de la parole de tous les résidents.

·         Professionnaliser les aidants à la collecte des informations.

·         Partager l’information entre tous les acteurs, professionnels, proches et résidents.

·         Poser les bases de ce qu’est un CVS conformément à la Loi 2002 et aux décrets.

·         Faire émerger les points d’évolution des textes concernant cette population.

·         Faire vivre le projet d’établissement.

·         Faire en sorte que les gens se sentent autorisés à utiliser l’outil CVS dans un espace de créativité.

·         Aider les acteurs à se réapproprier l’espace de liberté qui est le leur.

·         Montrer que la parole, le savoir,  les désirs des usagers du domicile et des établissements sont légitimes.

·         Voir la parole participative comme du » soin « et le CVS comme une sorte d’ » outil clinique ».

·         Passer de la frontalité et de la méfiance à une complicité constructive.

·         Montrer que le CVS formel est comme l’ossature d’une maison.

·         Donner de la chair à l’ossature qu’est le CVS.

·         Apprendre un fonctionnement de médiation en étant attentif aux conflits d’intérêts.

·         Garantir à l’établissement une ouverture vers l’extérieur.

·         Aider le citoyen à accéder à ses droits au plan social et médical et à les faire respecter.

·         Aider les proches à changer de regard sur leur parent.

 

 

Les établissements et les participants

 

Cette formation a été conçue et expérimentée dans le cadre d’une convention de partenariat signée entre la Fnapaef et la Fondation Médéric Alzheimer. L’établissement spécialisé K.H., qui fait partie de la maison St. à B.B. en Bretagne, nous recevait pour cette première session expérimentale. Nous remercions chaleureusement ici Monsieur J.A., Directeur général et Madame S.H., Directrice de K.H. pour leur accueil, leur hébergement et leurs contributions actives. Notons que pour ces deux établissements, il y a un CVS. Les membres du CVS d’un troisième établissement, le Foyer de l’A., dont S.H. est aussi Directrice faisait partie du groupe. Le fait d’avoir dans une salle les membres de plusieurs CVS contribue à enrichir sensiblement les échanges.

 

 

Les intervenants lors de l’animation de la session expérimentale

 

·         Joseph Krummenacker, formateur pour la Fnapaef

·         Cécile Delamarre, chercheur et praticienne en psychomotricité fonctionnelle, auteur de plusieurs ouvrages et créatrice de l’outil de collecte de l’information non-verbale auprès des résidents, outil apprécié, comme nous le verrons plus bas

·         Natalie Fournier, psychologue chez France Alzheimer Bretagne que nous remercions pour ses contributions.

 

Les modalités pédagogiques

 

Nous avons opté pour des modalités pédagogiques interactives. Il y a des apports théoriques principalement sur les textes, sur la communication non-verbale et sur les outils de collecte, mais nous misons surtout sur la dynamique du groupe à travers des travaux en commissions, des mises en commun, des questionnements, des échanges de pratiques et d’expériences. L’idée, c’est que chacun, en repartant, ait le goût et les moyens d’aller plus loin dans la pratique personnelle et collective du CVS.

 

 

Les contenus ont été traités sur deux journées espacées d’un mois

 

La prise de connaissance des textes, pour certains, ou la révision et l’amélioration pour d’autres participants a été répartie par séquences sur l’ensemble des deux journées. On pourra retrouver le détail dans notre support de cours.

 

L’esprit de la loi est important à saisir pour bien comprendre le rôle et le fonctionnement de l’outil de démocratie participative qu’est le CVS. Et nous savons, par des témoignages, qu’il est de trop nombreux établissements dans lesquels on fait de gros efforts pour contourner la loi de janvier 2002 et les droits donnés aux usagers et à leurs familles, ce faisant on massacre l’idée-même de démocratie participative et de représentation.

 

Mais là où nous sommes, c’est un acquis, il nous permet à tous, usagers, familles, professionnels, Direction, intervenants, de travailler ensemble pour voir comment aller plus loin avec le CVS, comment en faire un lieu et un outil au service de la qualité de vie de nos résidents touchés par la maladie d’Alzheimer et des autres aussi.

 

 

Le vécu des deux journées de formation

 

Venons-en à ce qui a été vécu durant ces deux journées. Si on voulait résumer l’essentiel de notre approche en quelques mots, on pourrait dire qu’il s’est agi :

 

·         de collecter l’information auprès des différents collèges et des personnes touchées par la maladie,

·         de faire remonter cette information et de la partager au niveau du CVS,

·         d’établir un dialogue et une recherche de coopération entre les résidents, les proches et les professionnels, dans le sens de la recherche d’une amélioration continue au bénéfice des usagers et de la qualité du travail.

 

Dans la première journée, le 13 janvier 2014, nous avons mis l’accent sur la collecte de l’information. Dans la seconde journée, le 18 février 2014, nous avons partagé l’information et mis l’accent sur la recherche d’une complicité constructive entre les résidents, les familles et les professionnels.

 

 

La collecte de l’information et le partage de l’information

Pour chacun des groupes que sont les résidents, les familles et les professionnels, nous rendons compte ici de ce qui a été dit et prévu durant la première journée en termes de collecte, puis nous continuons par ce qui a été rapporté durant la seconde journée.

 

La collecte de l’information est un point majeur. Avant de pouvoir échanger, il s’agit de collecter l’information. Les élus au CVS, résidents, familles et proches (ou représentants légaux), ainsi que les professionnels ont ici un rôle important à jouer. Pour pouvoir représenter les membres de son collège, il convient avant cela de les connaître, les rencontrer, les écouter, de collecter et synthétiser l’information afin de pouvoir la restituer de manière impersonnelle.

 

Le partage de l’information collectée, partage entre tous les acteurs, résidents, proches et professionnels est un second point majeur de notre démarche. Il s’agit de nous mettre en situation d’échanger sur les perceptions que nous avons les uns et les autres du ressenti et du vécu des résidents, des familles et des professionnels au regard de ce qui fait la qualité d’une vie et la qualité du travail dans notre établissement.

 

 

Les résidents

 

Les représentants des résidents, présents dans la salle, au sujet desquels il convient de noter que certains étaient très participatifs, s’étaient préparés à aller à la rencontre des autres résidents. Voilà une démarche dont le succès n’est pas garanti par avance. C’est une chose qui peut être plus ou moins difficile en fonction de différents paramètres.

Nous leur posons la question « Comment avez-vous procédé ? » « On est allé vers les gens, nous n’avons rien récolté, beaucoup d’entre eux ne nous disent même pas bonjour » et encore « cela fait 6 ans que je suis ici et ils m’appellent le parisien alors que je ne suis jamais allé à Paris. » Une des explications est peut-être  « nous ne sommes pas de B.B., nous sommes des étrangers pour les gens d’ici. » Quelqu’un demande « pourquoi alors avez-vous été élu ? » « J’ai été élu parce que personne ne voulait se présenter et que j’aime assez communiquer. »

Autre question « Qu’est-ce qu’il faudrait faire pour changer ça ? » « J’aimerais bien que vous me le disiez, peut-être que ce serait mieux si les élus étaient de B.B. ou peut-être que les élus des résidents pourraient se faire aider par les professionnels. » C’est une bonne idée qui va dans le sens de la coopération dont reparlerons plus bas.

 

Le climat semble différent au Foyer A. Il y a la chorale des résidents, mise en place par un Monsieur qui était avec nous durant la première journée. Les gens se parlent plus volontiers. Et puis, c’est une maison qui est en restructuration et en pleine évolution, évolution qui semble susciter un mouvement naturel de coopération. La progression rassemble.

 

 

Les familles

 

Question « Comment avez-vous procédé depuis la première journée pour contacter les familles et collecter de l’information ? » « Nous avons fait plusieurs choses. Notamment, nous avons envoyé un courrier à 120 personnes. » Notons que ce courrier était prêt pour l’envoi dès le soir même de la première journée de formation. Mais, ici encore, les réactions et les retours sont différents. A B.B., « nous n’avons pas une seule réponse » et ce Monsieur continue « j’ai interrogé plusieurs familles avec qui je parle, ils me disent qu’ils sont très satisfaits et que le personnel est très compétent. » La maison de B.B. a un label NF.

La même lettre, au Foyer A., a quant-à-elle reçu beaucoup de réponses. La même explication réapparait « chez nous, c’est une maison en chantier, le courrier est parti avec les factures et nous allons commencer une permanence mensuelle du CVS tous les mois, les gens y sont très favorables. » Cette permanence débutera le 28 février. Elle sera tenue par des résidents et des représentants des familles.

 

Mais l’explication de cette différence entre les deux établissements par l’écart de maturité ne satisfait pas tous les participants. Pourquoi les échanges se font-ils plus d’un côté et moins de l’autre ? « A St.J., quand les gens ont quelque chose à dire, comme sur la restauration par exemple, ils le disent. » Ces participants préconisent d’afficher la photo des élus et de faire régulièrement des réunions de familles avec une information orale sur le CVS, de manière à permettre à chacun de percevoir l’intérêt du dispositif. Et quand les gens verront mieux l’intérêt du CVS, « ils viendront pour contribuer et dire quelque chose, ils feront vivre la démocratie participative. »

 

Notons au passage, qu’entre les deux journées de formation, la représentation des familles de K.H. a été augmentée de deux personnes très participatives. L’un d’eux « je vais aller vers les familles et leur demander ce qu’ils savent du CVS et nous pourrions aussi demander à la Direction de nous transmettre les noms des familles entrantes, ce qui permettrait d’aller plus facilement vers eux, nous serions un peu aussi comme dans le rôle d’une association d’accueil. »

Les dames professionnelles présentes ajoutent leur avis à ce débat : « C’est vrai que le Foyer de l'A. a un caractère familial, cela permet plus facilement la communication. » Ce côté « familial » serait-il transposable ? « Ce n’est pas certain, c’est aussi une question de lieu, de taille, d’ambiance… »

 

 

Les professionnelles

 

Avec les professionnels, qui étaient ici des professionnelles, nous abordons une partie très spécifique de notre formation : rendre présents au CVS les personnes touchées par la maladie d’Alzheimer et maladies apparentées et souvent démunies de communication verbale.

 

Une réunion de CVS a eu lieu, dans l’un des établissements concernés, entre nos deux jours de formation. Une des professionnelles confie au groupe « j’ai ressenti lors de ce CVS, que les personnes touchées par Alzheimer, qui sont dans nos services, sont un peu comme oubliées au CVS, personne n’a fait le geste de représenter ces résidents au CVS. »

 

Le côté positif, c’est que déjà nous en avons conscience. C’est aussi l’enjeu de notre session CVS/Alzheimer.

 

Deux professionnelles étaient donc avec nous. Soulignons tout de suite le rôle important qu’elles y ont joué et les apports qu’elles ont faits au groupe.

En effet, si la collecte de l’information remontant des résidents et des familles repose sur les représentants des résidents et des familles, la collecte de l’information concernant les résidents touchés par la maladie d’Alzheimer repose sur les professionnelles.

 

Notons qu’à la sortie de la première journée, ces deux personnes ont-elles-mêmes formé plusieurs de leurs collègues à l’utilisation de l’outil que nous allons voir ci-dessous, de manière à pouvoir étendre la collecte de l’information aux trois établissements présents.

 

C’est ici que nous laissons la parole à Cécile Delamarre pour introduire et présenter l’outil qu’elle a conçu pour cette formation. Un grand merci à elle pour cet outil et pour la manière dont elle l’a fait vivre.

 

La communication non verbale par Cécile Delamarre, introduction (repris de notre support de cours)

 

Quelques infos de base :

 

• La communication non verbale est observable dans nos gestes, nos attitudes, nos mimiques, nos détentes et nos tensions musculaires ; dans nos inflexions vocales ainsi que dans les distances que nous mettons entre nous et autrui.

 

• Le langage non verbal représenterait environ 84% du contenu global de la communication. Autrement dit, lorsqu’une personne se tait, elle exprime environ huit dixième de ce qu’elle veut nous dire !

 

• Certains gestes et attitudes sont culturels (ils varient suivant les pays, comme le hochement de la tête de haut en bas pour acquiescer chez nous alors qu’en Grèce ou en Bulgarie, ce geste signifie pile l’inverse, à savoir la négation) et ils sont acquis dès le plus jeune âge.

 

• D’autres en revanche sont porteurs de nos états intérieurs et de nos émotions : ils sont interculturels et ne relèvent pas de l’acquis, comme la baisse du tonus musculaire en cas de déprime ou, à l’inverse, un état de tension dans l’anxiété.

 

À coup sûr, ces comportements observables vont nous permettre d’entendre ce qu’une personne nous dit en ce qui la concerne, dans ce qu’elle vit et ressent y compris à travers ce que nous lui donnons à vivre au quotidien !

 

 

Si cette communication non verbale exprime un mal-être chez les personnes qui les manifestent :

 

•       Observer leur qualité de vie dans le service qui les accueille revient à regarder attentivement et régulièrement chaque personne pour voir si ces comportements sont présents dans sa gestuelle.

 

•       Améliorer la qualité de vie revient dès lors à faire en sorte que ces comportements tendent à disparaitre, ce qui signifie qu’ils seront « entendus » et pris en compte dans la manière d’accompagner les personnes.

 

Pour ce faire, un petit outil peut vous y aider :

 

 

Formulaire d’observation, présentation et prise en main par les professionnelles

 

 

 

Date : ............................

Personne observée : .....................................................................................

Observateurs : ................................................................................................

................................................................................................

 

 

Comportements observables exprimant un état dépressif

 

Comportements observables exprimant un état d’anxiété

 

⃝ Pleurs fréquents, mélancolie

⃝ Asthénie, lassitude

⃝ Baisse du tonus musculaire (affaissement postural)

⃝ Ralentissement psychomoteur

⃝ Apathie

⃝ Inappétence

⃝ Décrochage de l'attention, distraction

⃝ Négligence vestimentaire (hors DFT)

⃝ Refus systématique des invitations/sollicitations

⃝ Désintérêt

 

⃝ Persévérations motrices (gestes compulsifs)

⃝ Persévérations sonores (sons répétés)

⃝ Tensions musculaires, rigidité (nuque, épaules, dos)

⃝ Hyper vigilance

⃝ Irritabilité

⃝ Cris, agitation

⃝ Opposition systématique

⃝ Boulimie

 

⃝ Cette personne n’a manifesté aucun des comportements listés ci-dessus.

 

 

 

 

Voilà donc nos deux professionnelles formées, qui, à leur tour forment plusieurs de leurs collègues et vont observer et collecter l’information issue des comportements non-verbaux. A St.J. 15 personnes sont observées, au Foyer A. 13 et à K.H. 10. Voici les remontées sous forme de diagrammes, en commençant par la maison St.J. où 21 personnes sur 120 ont bénéficié de cette observation.

 

Voici un l'un des tableaux qui ont été produits par les professionnels avec l'outil de Cécile D

 

 

 

Les professionnelles témoignent sur l’utilisation de l’outil de collecte

 

La feuille d’observation est d’une utilisation très facile et agréable. « Les collègues qui n’étaient pas avec nous en première journée ont trouvé l’utilisation de la feuille facile. »

 

Comme on l’aura vu à la lecture des diagrammes, les états dépressifs sont en pointe, suivis par les états d’anxiété. Il convient de préciser que nous avons ici des photographies d’une situation à un moment donné. Ces photographies peuvent remonter dans les réunions du CVS et bien avant cela, elles risquent d’être traitées par l’ensemble de l’équipe des soignants.

 

Nous avons tous compris que pour améliorer la qualité de vie de ces résidents, il convient de faire en sorte que ces comportement tendent à diminuer ou disparaître, ce qui signifie, qu’il seront « entendus » et pris en compte dans la manière d’accompagner les personnes.

 

Et justement, tous les échanges qui suivent dans le groupe, venant des professionnelles et aussi des familles, montrent clairement que chacun souhaite progresser dans la manière de comprendre et d’accompagner ces résidents.

 

Un représentant des familles demande si certaines attitudes ne seraient pas directement liées à la maladie plus qu’à la volonté d’exprimer quelque chose. Pour Cécile Delamarre et pour notre psychologue Natalie Fournier, ceci est à prendre en compte et les attitudes correspondant à de la communication comportementale représenteraient environ 80%.

 

Un époux suggère que l’établissement et le CVS puisse aussi apporter de l’information aux proches qui cherchent à s’adapter à la vie de leur malade.

 

L’humain, nous dit Cécile, est doté de très peu de comportements innés, sa connaissance est dans les bibliothèques, alors que pour la fourmi elle est dans sa carte génétique. Si j’ai mal aux dents, moi, je sais que je peux prendre un antalgique. Mais la personne malade d’Alzheimer ne suit plus ce cheminement cognitif, elle a oublié que si elle prenait quelque chose elle aurait moins mal. C’est donc aux personnels et aux accompagnants de compléter le processus pour donner ce qu’il faut… à condition d’avoir vu ce qui se passait.

 

Ce ne sont ici que quelques extraits des échanges qui ont eu lieu et la concentration sur le sujet est palpable dans le groupe à ces instants. Et l’intérêt est encore aiguisé à table, à midi, lorsque Cécile sort de sa poche une balle de base-ball qu’elle fait rouler en direction de la soignante assise en face d’elle et que celle-ci la rattrape et la lui renvoie sur la table. « Si l’un de vos résidents ne sait plus que pour manger il faut prendre sa fourchette, lancez-lui une balle, une ou deux fois, il se saisira de sa fourchette dans l’instant qui suit. » On peut aussi utiliser les réflexes innés archaïques oubliés pour, par exemple, faire ouvrir la bouche à quelqu’un en lui touchant le bord de la lèvre !

 

Sortons-nous du sujet du CVS ? Non, si nous relisons simplement le premier de nos objectifs à la page 3 de ce document qui est de contribuer à ce que les établissements soient des  lieux de vie et de concertation grâce au CVS.

 

Le positionnement des représentants des professionnels au CVS

 

Peut-être que certains connaisseurs du CVS, à la lecture de ce qui précède et concernant le rôle qui a été attribué ici aux représentants des professionnels, nous feront remarquer qu’il manque quelque chose dans la représentation desdits professionnels. Et ce serait exact.

 

Il convient de dire quelques mots du délicat positionnement des élus du personnel au CVS. Ce point sensible a aussi été relevé par les chargés de mission de l’Anesm qui ont produit récemment une étude qualitative sur la représentation des usagers et le fonctionnement du CVS.

 

Si on pose ces questions aux élus du personnel au CVS « Comment vous positionnez-vous dans le CVS ? Qui représentez-vous ? Quelles contributions apportez-vous ? A quelle liberté de parole vous sentez-vous autorisés ? » Nous verrons qu’il y a une certaine difficulté à répondre à ces questions. Et c’est peut-être parce que, dans la recherche du sens collectif du CVS, ce point aura été négligé.

 

Les élus des professionnels représentent leurs collègues au CVS. La mission du CVS est de comprendre le fonctionnement de l’établissement, de faire des analyses, de donner son avis, de faire des suggestions dans le sens de l’amélioration continue de la qualité de vie des résidents et des personnels et surtout de la jonction entre ces deux. Le fait-on quand on est représentant du personnel au CVS ?

La recherche d’une coopération entre tous les acteurs ou comment coopérer dans le cadre du CVS entre les acteurs concernés, au bénéfice de la qualité de vie des résidents, notamment pour faire baisser les niveaux de dépression et d’anxiété repérés par les professionnelles, comme relaté ci-dessus.

 

Disons que depuis le début de la mise en place de cette action expérimentale, nous avons travaillé en relation de partenariat ou d’équipe avec la Direction et les différents acteurs de la démarche. Et nous pensons que sans cette coopération initiale rien, ni ici, ni dans les missions qui pourront suivre, rien ne sera véritablement profitable.

 

Les aidants professionnels sont les « permanents » de la qualité de vie au sein des établissements. Pour progresser durablement il nous semble important que les Directions et des personnels suffisamment nombreux et représentatifs de l’organisme, soient partie prenante de l’action de formation dans un climat de coopération. Professionnels suffisamment nombreux, comme en homéopathie, pour teinter le système et lui permettre de réagir.

 

Voyons ce que disent nos participants sur le sujet de la coopération

 

Nous sommes, à cet instant, proches de la fin de notre session de formation expérimentale pour un CVS adapté aux publics concernés par les maladies cognitives et la maladie d’Alzheimer. Et nos lecteurs se souviennent que trois maîtres-mots sous-tendent ces deux journées de formation : collecte des informations en provenance des différents collèges et des malades, partage de ces informations au niveau du CVS et recherche de coopération entre tous les acteurs.

 

Le climat, à cette heure, autorise l’expression de ressentis personnels, reçus par une écoute respectueuse du groupe avec des temps de silence.

 

« Chacun a ses propres fragilités et nous sommes dans une situation d’interdépendance » annonce ce représentant des familles, « Il y a peut-être un travail à faire en amont pour accepter ses propres fragilités. »

 

« Chaque fois que je m’en vais, après être venu voir ma dame, chez elle, c’est l’angoisse, je cherche toujours à trouver quelqu’un de disponible dans le personnel pour prendre le relai au moment de mon départ, cela peut prendre une demi-heure, ceci est peut-être une chose à institutionnaliser.»

 

« Ce que vous dites, nous va droit au cœur, dit une soignante à ce monsieur, vous montrer du respect pour notre travail. »

 

Il y a aussi, du côté des professionnels, cette règle de déontologie du silence par rapport à ses propres ressentis. Mais si le silence devait, par trop, être maintenu au nom de la déontologie, quelle place resterait-il pour la communication et l’échange ?

 

Puis nous posons la question de savoir quelles modalités de coopération entre tous les acteurs pourraient être imaginées.

 

Il pourrait, nous dit un participant, y avoir des rencontres régulières, par services, entre les résidents, les familles et les soignants. Cela permettrait de créer du lien. Il y avait quelque chose de ce genre à K.H. avec les cafés-rencontres. C’est à force de se rencontrer que les échanges finissent par s’améliorer. Mais attention, poursuit ce proche, à l’époque où j’avais reçu une invitation pour ce type de réunion, l’invitation était signée « la psychologue » et moi dans ce temps là, je n’avais pas envie d’une séance de psy. « Je n’avais pas l’habitude de raconter ma vie à des tas de gens inconnus, mais à présent, j’aurais tendance à m’ouvrir davantage et à partager avant que cela ne soit trop tard. » Ces invitations pourraient être signées par le Président du CVS.

 

Un représentant des familles d’un autre établissement continue sur cette idée « oui, il y a quelque chose à créer au niveau de la rencontre. La permanence que nous avons mise en place après la première journée de formation pourrait elle aussi être un espace dédié à cela. » « Oui, continue un troisième, ce serait une bonne idée de faire une rencontre régulièrement par étages. »

 

Bien sûr, il convient que ces temps de rencontre ne prennent pas trop de temps au personnel soignant, il s’agit de trouver des modes de coopération sans manger trop de temps ? Quelqu’un évoque une personne repérée à K.H. qui semble s’occuper de la relation entre les familles et les professionnels. Cela existe en effet.

 

L’animateur reprend « alors, comment allez-vous continuer ce genre d’échanges coopératifs ? » Un proche reprend la parole et nous parle de son vécu que nous ne dirons pas ici. Cécile Delamarre et Natalie Fournier nous expliquent qu’il s’agit pour nous de comprendre les changements qu’entraîne la maladie, d’apprendre à penser comme les malades, d’apprendre à nous mettre à leur place, d’être un peu comme eux  et que certains mots qu’ils utilisent n’ont plus le même sens pour eux et pour nous. Un proche suggère « si on donne une formation ici dans ce sens, ce serait bien d’y inviter aussi les familles. »

Quelques commentaires avant de se quitter en fin de session

 

En fin de session et avant de nous quitter, plusieurs personnes prennent la parole pour exprimer en quelques mots leur ressenti.

 

·         « Pour moi cela a été un stimulant et cela m’a aidé à prendre conscience qu’être membre du CVS ce n’est pas juste avoir son nom dans la liste, je réalise qu’on peut être partie prenante dans la maison. »

·         « Jai pris conscience aussi de tout le rôle du CVS et du fait que nous avons encore beaucoup de travail à faire dans nos établissements. »

·         « Très intéressant, nous dit une personne qui nous a rejoint aujourd’hui, et c’est important que les échanges soit encadrés comme c’est le cas dans cette journée. »

·         « Cette rencontre entre trois établissements donne quelque chose de très fructueux, on entend d’autres expériences. »

·         « C’est aussi une bonne révision du CVS que je survolais un peu. »

·         « Très intéressant, disent les professionnelles, le CVS c’est un lieu riche où on peut se parler de bien d’autres choses que de la restauration. »

·         « Cela pourrait être intéressant qu’il y ait un CVS spécifique à K.H.. »

·         Cécile souligne le partage qui a eu lieu entre les acteurs et les échanges qui se sont construits ici.

·         Natalie « je vois tous ces liens qui se créent durant ces journées, un désir de respect et de construction dans le respect des avis différents. »

 

 

 

Commentaire synthétique

 

 Prenons encore un instant pour revenir à nos objectifs de départ :

 

·         Contribuer à ce que les établissements soient des  lieux de vie et de concertation grâce au CVS.

·         Faire remonter l’information des collectifs, résidents, proches et professionnels.

·         Professionnaliser les aidants à la collecte des informations.

·         Partager l’information entre tous les acteurs, professionnels, proches et résidents.

·         Poser les bases de ce qu’est un CVS conformément à la Loi 2002 et aux décrets.

·         Faire en sorte que les gens se sentent autorisés à utiliser l’outil CVS dans un espace de créativité.

·         Aider les acteurs à se réapproprier l’espace de liberté qui est le leur.

·         Passer de la frontalité et de la méfiance à une complicité constructive.

·         Montrer que la parole, le savoir,  les désirs des usagers du domicile et des établissements sont légitimes.

 

 

Il semble bien qu’un mouvement se soit opéré dans le sens de ces objectifs grâce à la contribution de chacun et il ne serait pas étonnant que des demandes de formations complémentaires apparaissent dans les prochains temps.

 

 

Merci à tous.

 

 

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